VILLEFRANCHE sur MER Patrimoine historique et maritime

J'ai décidé de vous parler, d'un magnifique patrimoine maritime historique qui me semble méconnu, pourtant je le considère comme l'un des mieux conservé de France; celui de Villefranche sur mer; voici donc en photos avec un petit rappel historique uniquement pour se situer dans le temps et vous donner envie d'approfondir le sujet.

Je replace les éléments du patrimoine dans l'ordre chronologique de construction:  

Vue d'ensemble de la Citadelle Saint-Elme protégeant l'entrée de la darse de Villefranche et la rade; la construction a débuté des 1557, sur décision du duc de Savoie Emmanuel Philibert; la protection de cet ensemble militaire est complété par le Fort du mont Alban au sommet du col de Nice; ces ouvrages dotés d'un plan en étoile sont en avance sur leur temps adaptés à l'artillerie, ils annoncent l'architecture militaire du XVII é siècle.

En 1669 on construit un Lazaret destiné à accueillir les personnes ou marchandises soumis à quarantaine, ce vaste ensemble comportait onze grands hangars; actuellement on peut encore voir une des tours carrées au sud de la Darse   

Le Lazaret tel qu'on pouvait encore le voir vers 1900



L'unique tour du Lazaret qui subsiste actuellement

Les voûtes du quartier militaire 

 

Les voûtes sur montées de la caserne tel qu'elles se présentaient avant les destructions de la Seconde guerre mondiale 

En 1719 sont construites les voûtes du quartier militaire; les huit arcades de pierre du quartier militaire sont l’entrée d’impressionnants couloirs voûtés de 25 à 50 mètres de long destinés, en particulier, à l’entrepôt des mâts et rames des galères. Les voûtes furent surmontées en 1774 par une caserne pour les soldats du Roi protégeant l’arsenal. La caserne fut détruite entre 1942 et 1945.



Les voûtes tel qu'elle se présentent actuellement



Les plafonds des voûtes; il reste des peintures d'époque



Détail des voutes, la salle dite du Gouverneur



Une vue actuelle; à gauche les voûtes; à droite le début de la corderie.

Le môle actuel du port est construit en 1725-1728, comme en témoignent les clés de voûtes des niches ornées de dates et de la croix de Savoie. Il s'appuie sur un mole précédent datant des années 1550.
À son extrémité, une mosquée turque pour les galériens musulmans a subsisté jusqu'à sa destruction par une tempête en 1773. A la citadelle est conservée une pierre portant une sourate du Coran en arabe; datée de 1724, cette pierre gravée provient probablement de la mosquée.
Le long du mole on peut observer des niches avec des croix de Savoie, elles servaient de cuisines aux galériens; le feu étant interdit sur les galères par suite des risques d'incendie.


Vue générale du mole coté mer, l'entrée est protégée par la citadelle Saint- Elme que l'on aperçoit sur la gauche


Voici sur la darse un anneau datant de 1727 aux armes du roi de Piedmont- Sardaigne


Une des niches du mole surmontée de la croix de Savoie et dans lesquels les galériens faisaient la cuisine lorsque les galères étaient à quai.


Vue au dessus du mole; au premier une des nombreuses canonnières battant l'entrée de la rade; sur la droite le bagne, l'ancien hôpital des galériens et au fond le lazaret.


Sur le sommet du mole le chemin de ronde




Vu générale du mole, à gauche la citadelle Saint-Elme; à gauche le bâtiment ocre tout en longueur est l'ancienne corderie

1730 : La « forme des galères » et la « vieille forge »

La « forme des galères » est le plus exceptionnel de la Darse ; son équivalent en France n’existe qu’à Rochefort. "Ce fut la première forme de ce type construite en Méditerranée : Celle de Toulon ne le fut qu'en 1774" . Dans ce bassin de radoub couvert à l’origine (cinq arches latérales, parallèles à la forme, soutenaient la toiture), les galères royales étaient construites et entretenues. Longue de 62 mètres sur 12 et superbement appareillée, la forme pouvait accueillir des navires de toutes dimensions. Sa porte monumentale à trois arches et la couverture ont été détruites en 1853 pour permettre le passage de bateaux à roues à aubes. En 1739, la première galère construite dans le nouveau site est lancée : La Santa Barbara.


La forme des galères utilisée aujourd'hui comme bassin de radoub pour l'entretien des yacht; le fond et la tête sont d'origine et correspondent à la taille des galères du XVIII è siècle


Autre vue de la forme des galères 

 
La forme des galères vue du sud; au fond la corderie



La forme des galères 



Les ateliers et la vieille forge

Le bâtiment situé à l'extrémité du bassin hébergeait les magasins et ateliers de l’arsenal ainsi que la forge. Construit entre 1725 et 1730, il est actuellement connu sous le nom de "vieille forge" bien que la forge n'en occupait que l'extrémité est surmontée d’une élégante cheminée en spirale de style génois.


Les ateliers et la vieille forge sont situées à l'extrémité de la forme des galères

1769 : L’hôpital des galériens

À la fois prison et hôpital pour accueillir 200 galériens, le bâtiment comporte de grandes nefs. Dans le pavement se voit encore la trace des anneaux qui retenaient les forçats. Une superbe grille ouvragée isole l’ancienne chapelle des galériens.
Il est abandonné en 1850 ; les galériens sont transférés alors à Impéria. Il reprend du service en 1870 et sert de quarantaine aux prisonniers niçois qui avaient le choléra. Après, il est mis à disposition des Russes pour y mettre leur réserve de charbon. Transformé en 1885 en station zoologique russe. Rattaché au CNRS dans les années 30. Actuellement Observatoire d'océanologie.

L’hôpital des galériens (aussi appelé le Bagne) en 1898


L’hôpital des galériens de nos jours


Façade coté terre de l’hôpital des galériens


Le chemin de ronde se poursuit du mole jusqu'à l’hôpital des galérien


Vue d'ensemble vers le sud; le mole, la vieille forge, l’hôpital des galériens et tout au fond le lazaret.

Joli reportage historique.

Source : BNF-Gallica

Une représentation, datant de 1700-1710 (datation exacte non précisée)



et une division de nos superbes cuirassés, au mouillage de Villefranche, en 1914.

1772 : La corderie

La corderie 

L’acquisition puis la construction de frégates nécessite de nombreux cordages pour le gréement complexe de ces nouveaux navires. L’assemblage de ces cordages se pratique dans un bâtiment très allongé (165 mètres sur 6 de large) qui fut rehaussé plus tard d’un étage.
Elle abrite depuis les années 1930, le CNRS (centre national de recherche scientifique).

Avec la corderie se termine la description des bâtiments de l'ancien port de guerre des Ducs de Savoie.

Depuis février 1990, le Port Royal de la Darse est inscrit à l'inventaire des Monuments Historiques. Les principaux bâtiments (le môle, les façades de l’ancienne corderie, l’ancienne forge, le soubassement de l’ex-caserne Dubois, le bassin du radoub, l’ancien bagne et le lazaret) sont également inscrits depuis février 1991.

Voici une vue ancienne (antérieure à 1914) de l'emplacement des quais et du petit port d'escale moderne; les lieux ont bien changés! à la place de ce port existait un petit bastion perché sur un rocher assez semblable au bastion du port de Menton.

Une photo originale: la cheminée de la vieille forge.

J'ai commencé ma visite du patrimoine villefranchois par la Citadelle Saint Elme; elle merite bien plus que cela joyeau d'architecture militaire, elle a été bien mise en valeur depuis qu'elle a été cédée à la commune; voici quelques photos supplémentaires.


Vue générale, il s'agit d'un ensemble assez imposant, bien conservé


La porte principale qui était fermée par un pont levis, dont il reste le contrepoids imposant


Autre vue sur l'entrée imposante


A l'intérieur des musées dans un cadre idylique


Musée en plein air


Musée intérieur

Et plein d'autres choses à découvrir au hasard de la promenade, un régal.

Villefranche sur mer; port, refuge, escale 


Villefranche sur mer a été de tout temps, un port, un refuge, une escale pour les navire aussi bien civils que militaires comme le prouve les recherches archéologique qui sont depuis plusieurs années effectuées dans les eaux de la rade.

Je pourrait vous citer entre autre le naufrage en 1516 de la caraque génoise La Lomellina qui fait l'objet de fouilles depuis vingt ans, et dont certains objets remontés font périodiquement l'objet d'expositions.

Voici un lien pour ceux qui désirent en savoir plus sur ces fouilles.
 http://www.culture.gouv.fr/fr/archeosm/archeosom/lomel-s.htm

Plus près de nous, voici des plaques commémoratives que l'on peut voir sur les quais du port: 


L'inscription de celle ci se suffit à elle même


Celle ci datant de juin 1959 déposée par les marins du CA139 Salem,  nous rappelle que jusqu'en 1962, Villefranche était de port d'attache du navire amiral de la 6ém flotte  américaine en Méditerranée



Voici donc le CA139 Salem l'un des nombreux navire-amiraux à avoir fréquenté la rade de Villefranche

Quelques flottes importantes et visites de navires célèbres à Villefranche sur mer


Sur cette photo prise en octobre 1879; une flotte franco- amérino-britannique dans la rade de Villefranche; on reconnais  de gauche à droite le français Desaix; l'US Quinnebaug; le français Bisson; l'US Enterprise; l'HMS Sultan;les français Couronne; Richelieu; Guyenne; Magnanime; Revanche; et Gauloise.

Les russes ont aussi apprécié pendant fort longtemps la rade de Villefranche 



Le yacht  du Tsar Nicolas II le célèbre Standart vers 1906 à Villefranche

En avril 1909 une importante flotte italienne et des navires français



A partir du premier on reconnais les cuirassés italiens Regina Elena; Vittorio Emanuele; le croiseur Agordat; et plus loin des cuirassés français dont le Patrie.

La rade de Villefranche accueille en janvier 1909 plusieurs cuirassés de la Grande flotte blanche (en anglais Great White Fleet) surnom donné à la flotte de guerre de des USA qui fit une circumnavigation du 16 décembre 1907 au 22 février 1909 sur ordre du président des Etats-Unis Théodore Roosevelt. Elle consistait en quatre escadres de quatre cuirassés, chacun avec leur escorte. Roosevelt souhaitait faire une démonstration de la puissance militaire grandissante des États-Unis et de ses capacités en haute mer.


Le BB21 Kansas en janvier 1909 à Villefranche



En février 1922 le cuirassé France accueille une escadre américano-britannique à l'occasion du Carnaval de Nice; on identifie en partant du premier plan: le croiseur HMS Coventry; le cuirassé US Utah; le cuirassé HMS Queen Elizabeth (qui a toujours ses deux cheminées) et enfin le cuirassé France (qui sera perdu le 26 août de la même année).

En février 1925 (remarquez que les escadres sont nombreuses en baie de Villefranche au cours du mois de février, motif: le Carnaval de Nice bien sur, qui attire nombre de marins de toute nationalité)
Sur cette carte postale, on reconnait en partant de la gauche et en suivant la ligne principale; le contre-torpilleur Amiral Senès ex allemand S113; le cuirassé Provence; le cuirassé britannique HMS Benbow; et vers l'entrée de la rade le cuirassé Bretagne; plus près du Cap Ferrat il y a aussi le cuirassé Paris; enfin de part et d'autre de l'Amiral Senès et de la Provence il y a deux lignes de torpilleurs du type Arabe de construction japonaise.



Sur cette carte postale de 1926; on distingue au premier plan le croiseur Metz ex allemand Koenigsberg attribué à la France en 1920; devant lui le cuirassé Bretagne, et devant la Bretagne le cuirassé Paris à droite du Paris le paquebot britannique Lancastria de la Cunard qui effectuait des croisières en Méditerranée; ce paquebot est malheureusement connu pour sa fin tragique le 17 juin 1940, ou il est coulé par l'aviation allemande devant Saint Nazaire alors qu'il transportait plus de 9000 soldats du corps expéditionnaire britannique faisant probablement plus de 4000 victimes, le nombre exact n'est pas connu officiellement!

Le 30 janvier 1928 à bord du cuirassé Provence en rade de Villefranche le maréchal Foch remet les insignes de Grand-officier de la Légion d'honneur au vice-amiral Docteur commandant en chef de la première escadre.
Le maréchal Foch était venu à Nice inaugurer le monument aux morts de la guerre 1914-18.



Début 1934; une escadre française; au premier plan le contre-torpilleur Tartu; à droite le contre-torpilleur Guépard; devant le Tartu le cuirassé Lorraine; et au loin vers le haut de la photo une flottille de torpilleurs de 1500 t.


Le renouvellement de notre flotte se poursuit; le 4 mars 1935; au centre bien reconnaissable le croiseur lourd Algérie qui vient d'entrer en service; à droite au premier plan les contre-torpilleurs Chevalier Paul et Tartu; à gauche l'arrière du croiseur lourd Foch; enfin en haut de la photo une flottille de torpilleurs de 1500 t.

Quelques navires importants photographiés dans la rade de Villefranche 


A tout seigneur tout honneur probablement le plus célèbre le HMS Warspite en 1938 devant le débarcadère de Villefranche il était accompagné ici du sloop HMS Aberdeen


En juin 1948 une autre célébrité l'US BB63 Missouri 

 
Vers 1953 (date approximative) Au premier plan le croiseur canadien Quebec; et au second plan l'US CA 148 Newport- News navire-amiral de la 6ém flotte US en Méditerranée (les trois croiseurs lourds de la classe Des Moines se sont succédé comme navire-amiral de la 6ém flotte)


Nous avons vu le Salem; le Newport News; voici le 3ém de la série le CA134 Des Moines à Villefranche en juillet 1959.

 Le CLG7 ex CL66 Springfield croiseur du type Cleveland transformé pour lancer des missiles Terrier; une des dernières visites de la 6ém flotte à Villefranche hélas.

Quelques navires français et non des moindres!



Le Richelieu à Villefranche en 1955, voir aussi mon avatar! (je suis monté à bord)


Le Jean- Bart à Villefranche en 1957 (je suis monté à bord)



Le Colbert à Villefranche vers 1965; avant sa refonte missiles



Le Clemenceau à Villefranche le 11 juillet 1976 ( j'ai failli visiter, trop de monde )


Le titre sur la photo dit tout 

Visites présidentielles à Villefranche.



Le 3 mars 1896 le Président de la République Felix Faure débarque du cuirassé le Formidable pour inaugurer le monument du centenaire à Nice (centenaire du rattachement du Comté de Nice à la France en 1796).


Le 10 avril 1901 le Président de la République Emile Loubet se rend à bord du cuirassé russe Alexandre II en rade de Villefranche portant la marque de l'amiral Birileff; il est reçu à bord par le Grand-duc Boris, cousin du Tsar.

c'est du sadiiisme !
désolé, Alain, mais je n'ai pas connu cette merveille (la rade de Villefranche), et je ne suis pas sur qu'elle soit toujours aussi belle.
je présume que les promoteurs immobiliers ne se sont pas privé de pourrir le site.
si je me trompe, dites le moi, j'accourrais. il y a des lieux qui m'ont toujours fait rêver.

La rade de Villefranche n'a pas tellement changé, d'ailleurs les photo du patrimoine que j'ai présenté sont récentes, d'ailleurs comme tout le littoral elle est maintenant protégée (un peut tard à mon gout) par la loi littoral.

NIALA a écrit:

La rade de Villefranche n'a pas tellement changé, d'ailleurs les photo du patrimoine que j'ai présenté sont récentes, d'ailleurs comme tout le littoral elle est maintenant protégée (un peut tard à mon gout) par la loi littoral.

ayant appris à vous connaitre (un tout petit peu), c'est ce genre de formule qui m'inquiète.
mais, bon; faudra bien que je voie cette fichue baie avant de crever.   dire que je suis passé plus de vingt fois à proximité sans la voir…
Landévennec, je connais; ce n'est pas très gai; alors me remonter le moral à Villefranche… je n'ai rien contre !

Merci Alain

J'aimais bien y aller quand j'étais à la Napoule et que la 6ème flotte y venait ainsi qu'à Théoule.