Les projets de la marine franquisteAu printemps 1939, la guerre d'Espagne laisse le pays de Cervantès épuisé, ravagé, exsangue. On comprend dans ces conditions la décision de Franco de rester à l'écart du second conflit mondial en dépit des pressions allemandes qui espéraient être remerciés d'un soutien intéressé.
Alors que le monde s'étripe, l'Espagne reste neutre, se reconstruit tout en réglant ses comptes, la répression contre les ennemis réels ou supposés du régime étant particulièrement vigoureuse ce qui prouve que le régime franquiste se sentait fragile et menacé.
Dans ce contexte là, la construction de porte-avions apparaît comme une gageure. C'est d'autant plus complexe que le général Echaguë, directeur de l'aéronautique militaire est farouchement opposé au porte-avions qu'il considère comme inutile et obsolète. Un visionnaire en somme..... .
De plus pendant la guerre d'Espagne le rôle de l'aviation embarquée à été anecdotique : le Dedalo était désarmé et les croiseurs lourds de classe Canarias n'avaient ni catapulte ni hydravion.
Pourtant le 18 juin 1943 Franco signe un décret qui prévoit la construction de quatre cuirassés et de quatre porte-avions avec un groupe aérien qui dépendait de la jeune Ejercito del Aire, l'armée de l'air espagnole.
Dans une réalité alternative, la marine espagnole aurait pu mettre en ligne quatre cuirassés type LittorioBien entendu ce décret n'aura aucun début de réalisation, l'Espagne n'ayant pas les moyens industriels, techniques et financiers pour un tel programme. Si pour les cuirassés l'Espagne souhaitait construire une version adaptée des Littorio italiens, pour les porte-avions les ingénieurs de la marine espagnole vont tenter mais sans succès d'acquérir les plans du Joffre et du Graf Zeppelin.
Pour les porte-avions, les espagnols ont tenté d'acquérir les plans du Graf Zeppelin et du JoffreLe second conflit mondial terminé le porte-avions est devenu incontournable pour toute marine majeure et comme la marine espagnole se considère comme telle forcément cela phosphore dans les bureaux d'étude d'outre-pyrénées.
Plusieurs projets sont étudiés comme les
Proyectos n°59 et
n°65 (projets n°59 et n°65) qui partaient d'une coque de pétrolier, un déplacement de 15000 tonnes avec un groupe aérien de 30 à 40 appareils essentiellement des chasseurs et des avions torpilleurs.
Proyecto n°66 : un croiseur lourd métamorphosé en porte-avions Le
Proyectos n°66 prévoyait la conversion du croiseur lourd Canarias (seul survivant de sa classe, le Baléares ayant été coulé durant la guerre d'Espagne) ce qui aurait donné un navire filant à 32 nœuds avec un groupe aérien composé de 36 chasseurs et de 12 avions-torpilleurs.
Le HMS Nabob (D-77)L'achat du porte-avions d'escorte Nabob est étudié mais abandonné. Un temps l'Espagne croit tenir son futur porte-avions sous la forme du croiseur lourd Trieste. Enfin plutôt l'épave car ce dernier avait été coulé à La Madalena (Sardaigne) par des B-24 américains.
L'achat est acté le 8 février 1951, la coque est relevée, remorquée au Ferrol mais le projet de porte-avions est stoppé par l'amiral Salvador Moreno, le nouveau ministre de la marine.
Le croiseur lourd TriesteCe fût probablement un mal pour un bien. En effet on imagine les difficultés qu'auraient rencontré les ingénieurs espagnols sans expérience pour transformer une coque endommagée par la guerre en porte-avions qui plus est à une époque où ce navire était discuté pour sa capacité (ou non) à mettre en œuvre des avions à réaction. De plus l'Espagne isolée ne pouvait pas bénéficier d'une aide extérieure.
Caractéristiques Techniques des différents projets espagnols :-Proyectos n°59 : 15000 tonnes, 163.6m de long sur 20.1m de large pour un tirant d'eau de 7.2m, deux diesels dévellopant 12000ch entrainant deux hélices, 17 nœuds, 12000 miles nautiques à 10 nœuds, 30 aéronefs, un armement composé de huit canons de 105mm et de huit canons de 37mm
-Proyectos n°65 : 15000 tonnes, 169.2m de long sur 20.1m de large pour un tirant d'eau de 7.2m, deux diesels dévellopant 12000ch entrainant deux hélices, 17 nœuds, 12000 miles nautiques à 10 nœuds, 40 aéronefs, 4 canons de 105mm et 10 canons de 37mm
-Proyectos n°66 : 14000 tonnes, 204.5m de long sur 19.5m de large pour un tirant d'eau de 6.5m, deux turbines à engrenages, huit chaudières à vapeur 90000ch, deux hélices, 32 nœuds, 8700 miles nautiques à 15 nœuds, 48 aéronefs, 4 canons de 120mm et 14 canons de 37mm.
Le Dedalo, un porte-hélicoptère, un porte-aeronefs pour la marine espagnoleAu milieu des années cinquante, l'Espagne guerre froide oblige sort de son isolement et intègre le bloc occidental, la péninsule ibérique devient une position clé dans le dispositif militaire de l'OTAN, l'Espagne abritant plusieurs bases navales et aériennes.
L'Armada Espanola bénéficie d'une aide massive des américains comme nous l'avons vu plus haut, des navires sont transférés, des fonds débloqués pour construire des navires neufs.
A l'été 1965, la marine espagnole va créer un groupe ASM permanent pour faire face aux loups gris de l'amiral Gorchkov. Outre la construction de navires anti-sous-marins, il faut trouver un porte-aeronefs pour mettre en œuvre des hélicoptères ou des avions ASM embarqués.
Comme le calendrier est serré, la construction d'un navire neuf est improbable. En revanche remettre en service un porte-avions américain sous cocon ou en fin de carrière c'est possible.
Après avoir étudié l'acquisition du Lake Champlain, du Thetis Bay et du San Jacinto c'est le Cabot de classe Independence qui est choisit.
Le USS Cabot (CVL-28)-Le
USS Cabot (CV/CVL-28) est mis sur cale aux chantiers navals de la New York Shipbuilding Corporation de Camden (New Jersey) sous la forme d'un croiseur léger baptisé Wilmington (CL-79) le 16 mars 1942.
Reclassé porte-avions (CV-28) le 2 juin 1942 et rebaptisé le 23 juin 1942, il est lancé le 4 avril 1943, reclassé CVL-28 et commissioned le 24 juillet 1943.
Il participe aux combats pour la conquête des îles Marshall, à différents débarquement à la Nouvelle-Guinée, à la conquête des îles Mariannes, à la Bataille de la mer des Philippines avant de s'occuper de la reconquête des Phillipines.
Après avoir attaqué le Japon métropolitain, le porte-avions léger participe à l'opération contre Iwo Jima en attendant de s'attaquer à Okinawa (opérations DETACHMENT et ICEBERG respectivement).
Il couvre la mise à terre des troupes d'occupation du Japon avant de participer à l'opération MAGIC CARPET, le rapatriement de millions de soldats, de marins et d'aviateurs.
Le USS Cabot (CVL-28) est désarmé à Philadelphie le 11 février 1947. Réarmé dès le 27 octobre 1948, il est affecté au programme d'entrainement de l'aéronavale de réserve (Naval Air Reserve training program), opèrant depuis Pensacola.
Relevé en 1951 par son sister-ship Monterey, le Cabot est redéployé à Quonset Point (Rhoe Island) ce qui ne l'empêche non seulement de se rendre en Europe (9 janvier au 26 mars 1952) et dans les Caraïbes.
Le USS Cabot (CVL-28) est à nouveau désarmé à Philadelphie le 21 janvier 1955. Il est reclassé transport d'aviation (AVT-3) le 15 mai 1959.
Le DedaloLe 30 août 1967, le porte-avions léger est loué à l'Espagne et rebaptisé Dedalo. Cette location est transformé en achat en 1972. La marine espagnole ne possédant pas d'aviation embarquée, le porte-avions léger est initialement utilisé comme porte-hélicoptères ASM avec des Sikorsky SH-3D Sea King ainsi que d'autres hélicoptères et ce de 1967 à 1976.
Entre-temps est apparu le Harrier, un avion de combat à réaction décollant et se posant comme un hélicoptère (
NdA en réalité le Harrier décollait comme un appareil conventionnel et se posait comme un hélicoptère car le vol vertical est vorace en carburant) redonnant la possibilité à des marines modestes de posséder une aviation embarquée même réduite.
L'Espagne qui eut un temps le projet de construire deux porte-avions de type Clemenceau expérimenta le Harrier depuis son porte-hélicoptères (8 novembre 1972). l'Espagne décida de commander des Harrier baptisés au pays de Cervantes Matadors.
Ce déploiement imposa un certain nombre de modifications pour le porte-avions léger qui reçut des plaques de métal pour encaisser la chaleur démentielle des tuyères des Harrier. Au total ce sont dix monoplaces AV-8S et deux biplaces TAV-8S qui vont être acquis. En l'absence de tremplin les Matadors ne pouvaient pas être employés au maximum de leurs capacités.
Le plus souvent le Dedalo embarquait un groupe aérien composé de huit Matador, de quatre Sea King et de quatre Agusta-Bell AB-212. D'autres appareils venant de l'armée de terre et de la marine pouvaient également être embarqués.
Durant sa carrière espagnole l'ex-Cabot passa 1650 jours à la mer, couvrit 300000 miles nautiques, enregistra 30000 manœuvres aviation, perdant un Matador et trois AB-212.
Naturellement le Dedalo n'à pas participé à des opérations de guerre mais à mené de nombreux exercices avec les autres marines de l'OTAN.
Arrivé à Rota le 20 décembre 1967 après une traversée de l'Atlantique depuis l'Arsenal de Philadelphie, le porte-avions devenu porte-hélicoptères doit être rendu aux Etats-Unis en 1973 sauf achat qui se produira en 1972 ce qui peut traduire une certaine incertitude dans les priorités de la marine espagnole.
En octobre 1969, il participe à l'exercice franco-espagnol Faron IV au large de Barcelone. A bord du porte-hélicoptères, le futur Juan Carlos 1er d'Espagne.
En octobre 1977 il participe à l'exercice Mar Canarias qui comme son nom l'indique à eu lieu dans les eaux entourant les Canaries.
Le 9 octobre 1978 il participe avec les frégates Baleares (F-71) Extremadura (F-75), les destroyers Lepanto (D-21) et Roger de Lauria (D-42), le sous-marin américain USS Shark (SSN-591) (classe Skipjack) à un exercice anti-sous-marin au large de Carthagène en Méditerranée. En novembre, il participe à l'exercice ARDEX-78 du 9 au 13 novembre 1978, un exercice amphibie exécuté sur la plage de Carboneras près d'Alméria.
En avril 1980, il participe à des manœuvres aéronavales en baie de Palma (de Majorque). Le 20 janvier 1983 ses hélicoptères sauvent huit marins du cargo polonais Kudowa Zdroj qui à coulé à sept miles d'Ibiza après un ripage de sa cargaison.
Le 14 mai 1986 alors que le porte-aéronefs était au large de Carthagène, un hélicoptère entre en collision avec le mat du Dedalo. L'appareil _un AB-212_ qui appartenait à la 3ème escadrille s'écrase en mer lors de cet exercice de nuit. Trois hommes sont tués et un quatrième porté disparu présumé mort.
En juin 1987, son successeur navigue avec lui comme un passage de témoin notamment lors de l'exercice Flota-87.
En 1988 le Principe de Asturias construit selon des plans inspirés des morts-nés SCS (Sea Control Ship) remplace le Dedalo qui est retiré du service actif en août 1989. Il est cédé à une organisation destinée à le transformer en navire-musée mais malheureusement cette dernière ne parvint pas à trouver les fonds nécessaires.
Le 10 septembre 1999 l'US Marshals Service (qui ne fait pas que pourchasser les criminels ou protéger les témoins) le vend aux enchères à Sabe Marine Salvage de Rockport Texas qui procéda à son démantèlement, démantèlement achevé en 2002.
Caractéristiques Techniques de la classe Independence
Déplacement : standard 9980 tonnes pleine charge : 13700 tonnes
Dimensions : longueur hors tout 189.74m longueur à la flottaison 182.6m largeur : 21.87m à la flottaison (33.3m hors tout) tirant d’eau : 7.72m
Propulsion : 4 groupes de turbines à vapeur General Electric alimentées par 4 chaudière Babcox et Wilcox (39.7kg/cm²) développant une puissance totale de 100000ch et actionnant 4 hélices
Performances : vitesse maximale : 31.5 nœuds distance franchissable : 12500 miles nautiques (24000km) à 15 nœuds (28 km/h)
Electronique : radar de veille air SK-2 remplacé ensuite par un radar SM, radar de veille surface SG, balise pour avions YE installés sur l'ilôt, radar de veille air type SK entre la seconde et la troisième cheminée. Le Dedalo embarquait lui un radar SPS-6.
Protection : la coque est protégée par une ceinture d'une épaisseur variant de 25 à 114mm, le pont du hangar qui est l'ancien pont principal du croiseur est protégé par 56mm de blindage
Armement :
L'armement originellement prévu était de seize canons de 20mm Oerlikon, de vingt-six canons de 40mm Bofors et de deux canons de 127mm.
Le 127mm de proue est rapidement remplacé par un affût Bofors de 40mm quadruple et celui de poupe à été également remplacé par un autre affût quadruple. Seul le USS Independence (CVL-22) à reçu les deux canons de 127mm initialement prévus.
Installations Aéronautiques
-Pont d’envol de 168m de long sur 22m de large
-Hangar de 78.6m de long sur 17.67m de large et 5.28m de haut (pour comparaison celui des porte-avions légers de classe Colossus à une hauteur de 5.33m)
-Une puis deux catapultes hydrauliques H2
-9 brins d’arrêt
-Une barrière d'arrêt est positionnée à hauteur de l'ilôt
-Deux ascenseurs axiaux, un de 13.4m et un autre de 12.8m
-Une grue de 6.4 tonnes installée devant l'ilôt
Groupe Aérien :
Les Independence peuvent embarquer une quarantaine d’appareils même si leur nombre est souvent réduit pour faciliter les opérations aériennes.
Parmi les appareils embarqués durant la guerre du Pacifique figure le F4F Wildcat, le F6F Hellcat de chasse, le Grumman TBF Avenger de bombardement et de torpillage. Le Curtiss SB2C Helldiver un temps embarqué à été vite retiré car l'absence d'ailes repliables rendait son utilisation difficile sur des porte-avions aussi étroits.
En 1945, on à envisagé de dôter les Independence d’un groupe aérien composé de F8F Bearcat pour les spécialiser dans la chasse (l’Independence à été un temps spécialisé dans la chasse de nuit)
Durant la guerre de Corée, le USS Bataan (CVL-29) embarquait des Chance-Vought F4U Corsair des Marines mais aussi des Grumman AF-2S/W Guardian de lutte anti-sous-marine et un détachement d'hélicoptères Sikorsky HO3S-1 Dragonfly.
Les deux Independence passés sous pavillon français ont embarqué un groupe aérien d'abord composé de F6F-5 Hellcat et de TBM Avenger puis composé de Chance-Vought F4U Corsair et de Curtiss SB2C Helldiver
Le Dedalo à d'abord embarqué uniquement des Sikorsky SH-3 Sea King de lutte anti-sous-marine (l'Espagne à acquis huit SH-3H de lutte anti-sous-marine et trois SH-3W de veille aérienne avancée) puis des Sikorsky SH-3, des Agusta-Bell AB-212 et des AV-8S Matador.
Le groupe aérien le plus courant se composant de huit Matador, quatre Sea King et quatre AB-212, des hélicoptères de transport et d'attaque de l'armée de terre pouvaient aussi embarquer.
Equipage : 1569 officiers et marins (groupe aérien compris) Genèse du Principe de Asturias : la concrétisation du SCS et du rêve de l'amiral ZumwaltAvant de parler de la genèse du porte-aeronefs espagnol il me semblait important de parler d'un amiral peu connu sous nos contrées, l'amiral Elmo Zumwalt, Chief of Navals Operations (CNO) de 1970 à 1974 et qui tenta avec des succès divers de sortir une marine américaine qui s'était endormie sur ses lauriers et qui ne savait comment faire face à la montée en puissance en apparence irresistible de la marine soviétique de l'amiral Gorchkov (Nda tiens tiens cela me rappelle un truc)
Elmo Russell «Bud» Zumwalt Jr est né le 29 novembre 1920 à San Francisco.
Il entre à l'Académie Navale d'Annapolis en 1939 et en sort diplomé en 1942, participant naturellement à la guerre du Pacifique à bord du destroyer USS Phelps (DD-360) avant d'être détaché pour instruction au commandement d'entrainement opérationnel du Pacifique en 1943 puis de retrouver le combat en 1944.
A bord d'un destroyer de classe Fletcher le USS Robinson (DD-562), il participe à la titanesque bataille du Golfe de Leyte, recevant la Bronze Star alors qu'il opérait au CIC (Combat Information Center). Il est ensuite affecté à bord des USS Saufley (DD-465), USS Tills (DE-748) et USS Zellars (DD-777)
Il participe ensuite à la guerre de Corée à bord du USS Wisconsin (BB-64) en 1951/52. Au début des années soixante il devient conseiller de Paul Nitze, lui permettant de devenir Secrétaire à la Marine le 29 novembre 1963.
Il devient contre-amiral en 1965 à l'âge primsautier de 44 ans puis vice-amiral en 1965, commandant les forces navales américaines engagées au Vietnam en 1968. Ce conflit qu'il à désapprouvé dès le début lui coutera un fils en 1988. En effet son fils ainé engagé dans la marine sera exposé au sinistre Agent Orange et décédera d'un cancer.
En avril 1970 il devient le plus jeune CNO de l'histoire de la marine américaine avant d'être promu amiral le 1er juillet 1970. Il secoue l'US Navy en luttant contre les discriminations notamment raciales, le premier amiral afro-américain est ainsi nommé sous son mandat.
On l'accuse de tous les maux mais le fait est que les engagements augmentent significativement sous son mandat.
Il se préoccupe du déclin relatif de l'US Navy face à la montée en puissance de la marine soviétique qui avait tiré les leçons de la crise des missiles de Cuba qui avait rélévé des faiblesses alarmantes dans le domaine des forces de surface.
Il veut obtenir des crédits supplémentaires mais le contexte n'est guère favorable entre la fin de la guerre du Vietnam et le premier choc pétrolier.
Représentation d'artiste du SCSComme nous l'avons vu plus haut, il essaye de remplacer les Essex anti-sous-marins en fin de vie par des porte-aeronefs pour couvrir en temps de guerre les convois et soulager les porte-avions lourds.
Ci-dessus le USS Spruance (DD-963), un navire puissant et coûteux et ci-dessous la frégate USS Oliver Hazard Perry (FFG-7)Il échoue à imposer son SCS mais parvient à initier des programmes de navires à la fois puissants et coûteux comme la classe Spruance et des navires moins coûteux comme la classe Oliver Hazard Perry. Il se montre en revanche hostile au programme Los Angeles qu'il considère comme trop coûteux. Il échoue à imposer ses hydroptères de classe Pegasus (six construits sur les 100 prévus).
Retiré de la marine américaine le 1er juillet 1974, il publie ses mémoires «On Watch : a memoir».
Jusqu'à sa mort le 2 janvier 2000 à Durham en Caroline du Nord, il va continuer une carrière publique et politique. Il échoue aux élections sénatoriales en 1976 en Virginie et va par la suite faire un travail d'influence notamment en faveur des soldats, aviateurs et marins victimes de maladies causées par exemple par l'Agent Orange ou l'amiante.
A-t-on déjà vu navire de surface plus laid ? Pour lui rendre enfin hommage, l'US Navy décide de baptiser un destroyer à son nom mais le DDG-1000 trop coûteux (ce qui aurait probablement fait hurler ce cher Elmo) ne sera que le premier d'une série de trois au lieu des 24 prévus.
Marié à Mouza Coutelais-du-Roche (issu d'une famille franco-russe rencontrée en 1945), il à eu quatre enfants : ElmoRussell Zumwalt III; James Gregory Zumwalt; Ann F. Zumwalt Coppola; and Mouzetta C. Zumwalt-Weathers.
Revenons au Principe de Asturias. A l'origine figure donc la volonté de l'amiral Zumwalt de construire le successeur du CVE voir du CVL avec non plus des avions à aile fixe mais des hélicoptères ASM et pour les protéger des Harrier qui permettaient au porte-aeronefs de s'assurer une forme d'autoprotection voir de protéger les navires assurant leur escorte. C'est l'acte de naissance du Sea Control Ship (SCS).
Plusieurs variantes sont étudiées pour un tonnage de 8400 à 21480 tonnes, le modèle retenu étant un navire de 13736 tonnes. Pour valider ce concept, le porte-hélicoptère USS Guam (LPH-9) est transformé en SCS avec Harrier du VMA-513 et Sea King du HS-15 en janvier 1972, jouant ce rôle jusqu'en avril 1974.
Le lobby nucléaire fait rejeter le projet de construire huit navires de ce type tout comme son successeur le VSS (V-Stol Support Ship) plus gros (22490 à 29130 tonnes) avec 22 hélicoptères (12 pour le SCS) et 4 Harrier (4 pour le SCS également) et une vitesse plus importante (29 noeuds contre 26). les projets de porte-aéronefs et de porte-avions économiques sont enterrés après le départ de l'amiral Holloway, CNO, en 1978 qui avait succédé à Zumwalt en 1974.
Es-ce à dire que ce projet va rejoindre le rayon des projets avortés ? Non car le concept SCS va rebondir Outre-Atlantique en Espagne.
Dans le franquisme finissant, décision est prise le 6 janvier 1974 de trouver un remplaçant au Dedalo qui à alors plus de 30 ans. L'Espagne lance un appel à projet et étudie des propositions françaises (PH-75), britanniques (type Invincible) et américaines (projet SCS).
Le 29 mai 1977, les plans et les droits du projet SCS sont achetés par l'Espagne à Gibbs & Cox. Le rêve de l'amiral Zumwalt va donc voir le jour mais pas dans son pays d'origine.
Reste à lui trouver un nom. Après avoir écarté les noms de Lepanto Espana Dedalo ou Canarias, la marine espagnole choisit le nom d'Almirante Carrero Blanco du nom du premier ministre franquiste assassiné par l'ETA le 20 décembre 1973.
Bien entendu alors même que le porte-aéronefs n'était pas encore sur cale, un tel nom était impossible à maintenir après la mort de Franco le 20 novembre 1975. exit Almirante Carrero Blanco et place à Principe de Asturias (Prince des Asturies), le titre porté par l'héritier au trône d'Espagne.
Le chantier constructeur : Navantia du FerrolLe site galician de Navantia situé au FerrolLe chantier naval ayant construit le Principe de Asturias est situé à Ferrol en Galice. C'est le cinquième plus gros chantier naval d'Europe et le 9ème plus gros du monde.
En 1967 l'entreprise Astilleros Espagnoles S.A (Arsenaux d'Espagne) voit le jour par la fusion des chantiers navals Euskalduna de Bilbao, la Naval de Sestao et les Astilleros de Cadiz. Cette fusion est le moyen de sauver la construction navale espagnole qui connait de sérieuses difficultés.
En juillet 2000 l'entreprise fusionne avec les chantiers navals Empressa Nacional de Bazan pour former le groupe IZAR.
En mars 2005 la branche navale IZAR fusionne avec la Sociedad Estabal de Participaciones Indusriales (SEPI) pour former le groupe Navantia. Actuellement le groupe comprend 5500 salariés (NdA chiffres de 2016).
Parmi les principaux navires militaires construits par Navantia ou ses ascendants nous trouvons les porte-aéronefs Principe de Asturias et Chakri Naruebet, le porte-hélicoptères amphibie Juan Carlos I (qui à remplacé le premier nommé comme porte-aéronefs de la marine espagnole), les porte-hélicoptères amphibies Canberra et Adelaïde, les transports de chalands de débarquement de classe Galicia, les pétroliers ravitailleurs Cantabria et Patino, les frégates type F-100 et leurs cousines norvégiennes Fridjof Nansen, des navires légers pour la marine espagnole et l'export (Venezuela, Arabie Saoudite), des sous-marins S-80 après avoir participé au programme Scorpène.
Dans les années quatre-vingt dix, les chantiers navals IZAR ont proposé des porte-avions conventionnels (catapultes à vapeur et brins d'arrêt) à l'Espagne, à l'Argentine, au Brésil et à la Chine.
C'est le projet
SAC-220, un porte-avions CATOBAR (Conventional Tak Off But Arrested Recovery) à propulsion conventionnel (turbines à gaz), de 27000 tonnes (soit en gros le déplacement d'un Essex de la seconde guerre mondiale), mesurant 241.8m de long sur 22.5m de large avec un tirant d'eau estimé de 9.5m.
Avec une puissance propulsive de 66MW, il aurait pu atteindre 26 nœuds et franchir 7500 miles nautiques à 15 nœuds. Son équipage aurait été de 1000 hommes, son groupe aérien de 25 aéronefs.
Le pont d'envol aurait mesuré 240m de long sur 45m de large avec un hangar de 160m sur 35m (estimation), deux ascenseurs et deux catapultes de 75m.
De nombreux modèles d'appareils auraient pu être embarqués : Rafale M, F-18 Hornet, Mig-29K, Super Etendard, Skyhawk, HAL Tejas, des versions embarquables de l'AMX A-1 italo-brésilien et du Gripen suédois, des S-2E et G Tracker, des E-2 Hawkeye, des S-3 Viking et des Alizé.
A l'origine de ce programme figure la volonté de Bazan de capitaliser sur les constructions des Principe de Asturias et Chakri Naruebet et de proposer un porte-avions économique permettant notamment le remplacement d'unités héritées du second conflit mondial.
Le projet SAC-220 à d'ailleurs été pensé pour le remplacement du Veinticinco de Mayo argentin pour un coût de 500 millions de dollars de l'époque (953 millions aujourd'hui).
L'Argentine est intéressée mais la crise économique de 1998/2002 enterre toute possibilité de remplacer le 25 de Mayo. Le Brésil préfère racheter le Foch français pour un prix bien moins élevé mais les nombreuses réparations me font penser que l'achat du SAC-200 aurait peut être été plus intelligente sur la durée.
L'Inde fait le même choix pour remplacer le Vikrant en achetant l'amiral Gorshkov qui après des travaux aussi interminables que coûteux est devenu le Vikramaditya. La Chine aurait été intéressée mais davantage pour des transferts de technologie et de plans que dans l'acquisition d'un navire stricto sensu. De toute façon avec l'embargo de 1989 c'était compliqué d'imaginer un porte-avions fabriqué en Espagne.
L'Espagne aurait pu construire un porte-avions de ce type. Certains analystes militaires auraient proposé une version évoluée du SAC-220 pour remplacer le Principe de Asturias et opérer avec le Juan Carlos I. Il aurait embarqué une version navalisée du Typhoon qui restait à mettre au point. Une broutille quoi. Autant dire que la possibilité de voir la marine espagnole posséder un porte-avions conventionnel appartient au domaine de la science fiction ou de l'uchronie.
Outre le site du Ferrol (Astillero de Ferrol), la compagnie Navantia possède d'autres sites : son siège social à Madrid, un chantier de construction navale à Cadiz (Arsenal de la Carraca), un autre site situé à Puerto Real toujours en baie de Cadiz (Astillero de Puerto Real), un site technique à Rota (Astillero de Cadiz-Instalaciones de Rota) et le centre d'entrainement d'information à San Fernando comme le premier site. On trouve également l'Astillero de Fene situé à La Corogne et l'Astillero de Cartagena en Murcie.