CARACTÉRISTIQUES DES PORTE-AVIONS DE CLASSE ESSEXSchéma de la classe EssexPrésentation généraleEn guise d'introductionLe porte-avions est apparu comme nous le savons au cours de la première guerre mondiale avec le Furious, un croiseur de bataille transformé progressivement en fonction des leçons tirés de son utilisation par la Royal Navy.
Comme toutes invention, on cherche, on essaye, on tâtonne, faute d'expérience préalable pour éviter de s'engager dans des voies sans issues.
C'est le cas sur l'organisation générale du porte-avions. Un pont plat devait pouvoir faire décoller et apponter ses avions ce qui imposait de sévères contraintes même si les premiers avions embarqués n'étaient pas très exigeants.
Les marines les plus en pointe (Etats-Unis et Japon surtout, la Grande Bretagne restant un peu en retrait) comprirent que pour qu'un porte-avions soit efficace il devait pouvoir faire décoller et récupérer ses avions le plus vite possible.
Une configuration pour le moins étonnante : l'Akagi avec trois ponts d'envol superposés
Après des configurations étonnantes (deux voir trois ponts superposés), le pont unique s'imposa avec un ilôt installé le plus souvent à tribord. Le HMS Glorious peut faire apponter trente-deux appareils en quarante-deux minutes alors que le USS Saratoga fait apponter quarante chasseurs Vought Corsair en seulement onze minutes et vingt secondes.
Le triomphe du pont d'envol unique ne signifie pas le triomphe d'une seule configuration, deux architectures s'opposèrent, «l'anglaise» et «l'américaine».
Le HMS Illustrious (R-87) au pont d'envol blindéLa configuration dite «anglaise» intègre le hangar à la coque du porte-avions, le hangar est indissociable de l'architecture générale du porte-avions, cette architecture étant marquée par l'installation d'un pont blindé qui le rend particulièrement apte à faire face aux attaques comme le Formidable qui touché par un kamikaze reprend le combat quelques heures plus tard ou l'Illustrious qui survit à six bombes du X. FliegerKorps au large de la Sicile le 10 janvier 1941.
Cette configuration se paie cependant au prix d'un groupe aérien réduit qui ne pose guère de problèmes quand les britanniques utilisent leurs porte-avions pour protéger des convois ou mener des raids de faible ampleur mais se révélera problématique pour des attaques massives et prolongées. Cela rendra également leur modernisation très difficile et seul le Victorious sera modernisé à grands frais pour un résultat médiocre.
Celle dite «américaine» choisit une toute autre optique. Le navire en lui même est une coque fermée mais le pont d'envol est monté en superstructure, l'espace entre le pont principal et le pont d'envol formant le hangar.
Cette configuration à l'avantage de permettre l'embarquement d'un groupe aérien conséquent, bien plus important que pour les porte-avions construits à l'anglaise.
Cet avantage à un revers : le pont en bois n'est d'aucun secours pour résister aux bombes et aux kamikazes, un porte-avions américain touché est gravement endommagé et doit être retiré du service pour de longues semaines voir plus même si l'expérience des équipes de lutte contre les avaries fera de véritables miracles et limitera l'impact stratégique des kamikazes.
Ces architectures répondent à deux contextes d'utilisation différentes. Les britanniques doivent opérer dans des mers resserrées (Manche, mer du Nord et Méditerranée) où les menaces sont nombreuses : sous-marins, batteries côtières, mines, aviation basée à terre et surtout sans réelle possibilité d'esquive. Il faut donc être prêt à encaisser les coups à défaut de pouvoir l'éviter. Les américains doivent principalement opérer dans le Pacifique, un océan gigantesque où les possibilités d'esquive sont nombreuses.
A cela s'ajoute un modus operandi différent : les britanniques veulent utiliser leurs porte-avions pour couvrir des convois et protéger leurs interminables lignes de communication et peuvent donc se contenter de groupes aériens «modestes» alors que les américains doivent engager leurs porte-avions dans une gigantesque bataille de rencontre contre leurs homologues japonais qui doivent comme eux préparer le terrain aux «gros».
Enfin, c'est aussi une question riche/pauvre. Les américains bénéficient d'une industrie qui leur permet de remplacer un navire perdu à la différence de la Grande-Bretagne dont les chantiers aux techniques souvent obsolètes sont surchargés (soudure peu répandue notamment).
Les Essex sont conçus dans un contexte troublé qui impose aux architectes navals américains de limiter les prises de risques. Le CV-9 et ses vingt-trois compères peuvent être considérés comme des Yorktown «sous steroïdes», plus gros et plus puissants.
Au sortir de la guerre, surchargés de canons antiaériens et de radars non prévus, ils sont vus comme dépassés surtout quand on les comparaient avec les Midway qui venaient de sortir de chantier.
L'histoire se chargea de démontrer le caractère éroné de ce jugement. Les Essex se révèleront capables d'absorber facilement une puis deux refontes qui transformèrent radicalement leur silhouette.
Les refontes : SCB-27 et SCB-125Schéma des Essex refondus SCB-125.Au sortir de la seconde guerre mondiale, les partisans du pont plat de l'US Navy aurait pu bomber le torse. La victoire est due en grande partie à ces navires auxiliaires ou secondaires devenus des
capital ships.
En effet, ils ont contenu l'ouragan japonais avant de détruire méthodiquement son empire non sans pertes (destruction du Lexington Yorktown Hornet et Wasp pour ne citer que les porte-avions de première ligne) et ils ont vaincu les sous-marins allemands dans l'Atlantique.
Pourtant le porte-avions connait une crise de conscience menacé par l'USAF et la bombe atomique, devenu l'alfa et l'oméga de la stratégie américain, Washington possédant jusqu'en 1947 le monopole de cette arme terrifiante.
En dépit des essais de Bikini, les aviateurs et beaucoup de leurs partisans en politique estiment ce type de navire dépassé (incapable de délivrer le feu nucléaire) et vulnérable (concentration de munitions, de combustible et de matières inflammables) et donc voué à disparaître.
Les marins vont se battre et non sans mal vont obtenir la modernisation de leurs Essex en parallèle de la construction de nouveaux porte-avions bien plus gros que les Essex et dépassant d'une tête les Midway.
Trois refontes vont se succéder voir même se mélanger en raison d'études complémentaires et de l'apparition au cours de ce grand programme de modernisation de nouvelles technologies dont je parlerai en temps utiles.
La première refonte est baptisée SCB-27A (
Ship Caracteristic Board project 27) consiste en une série de travaux de modernisation qui ont été testés sur le USS Oriskany (CV-34) resté inachevé après guerre et qui à lui tout seul forme le type SCB-27. Les travaux de la refonte SCB-27A sont les suivants :
-Renforcement du pont d'envol pour supporter les North American Savage
-Ascenseurs plus grands et plus puissants
-Catapultes hydrauliques plus puissantes
-Brins d'arrêt adaptés à des avions plus lourds, plus gros et plus rapides
-Débarquement des tourelles de 127mm installés devant et derrière l'ilôt remplacés
par des canons de 127mm en affûts simples (deux à chaque angle du pont d'envol)
-Remplacement des canons de 40mm par des canons de 76mm
-Ilot plus court et plus haut avec une cheminée de forme différente pour éliminer les interférences avec les radars
-Salle d'alerte des pilotes installée désormais sous le pont blindé et non sous le pont d'envol relié au hangar par un
escalator
-Augmentation de 50% de la capacité en carburant
-Meilleur système de sécurité incendie
-Augmentation de la capacité de production électronique
-Réorganisation des soutes à munitions pour faciliter la gestion et la manutention
Ces modifications éliminent une différence entre les coques courtes et les coques longues, la silhouette étant désormais identique. Ces refontes ont accru le poids de 20% ce qui entraine un navire plus bas sur l'eau et une vitesse maximale réduite à 31 nœuds.
Huit Essex subissent cette refonte en l'occurence l'Essex, le Wasp, le Kearsarge,le Lake Champlain,le Bennington,le Yorktown, le Hornet et Le Randolph. L'Essex, le Kearsarge et le Lake Champlain sont engagés en Corée, ce dernier échangeant même des unités avec le Boxer non modernisé pour faciliter les opérations aériennes.
Alors que les travaux sont en cours, des études complémentaires montrent que la refonte SCB-27A peut être perfectionnée. D'où la mise au point de la refonte SCB-27C qui comprend les travaux complémentaires suivants :
-Deux catapultes à vapeur C11 en remplacement des catapultes hydrauliques
-Des déflecteurs de jet refroidis par eau de mer
-Une barrière pour récupérer un avion ayant cassé sa crosse d'appontage
-Des installations de manutention pour armes nucléaires (pas installés sur tous les SCB-27A)
-L'ascenseur n°3 (axial arrière) est déplacé à tribord arrière
Trois porte-avions sont refondus en l'occurence le Hancock, l'Intrepid et le Ticonderoga. Ils auraient du être suivis par le Shangri-La, le Lexington et le Bonhomme Richard mais une révolution technique va bouleverser le programme.
Cette révolution c'est l'apparition de la piste oblique et du miroir d'appontage. Cette révolution permet d'améliorer la mise en œuvre des avions à réaction qui en appontant sur la piste oblique peuvent remettre les gaz et tenter une autre approche sans risquer d'emboutir les avions rassemblés à l'avant du pont.
Elle permet une révolution tactique avec la capacité CATAPPO (
CATapultage et APPOntage) permettant de catapulter des avions et d'en réceptionner une à condition que le pont d'envol soit suffisamment long et large.
La refonte SCB-27 va muter en refonte SCB-125, refonte que vont subir tous les SCB-27A à l'exception du Lake Champlain (prévue elle à été finalement abandonnée en 1958).
Outre la piste oblique et le miroir d'appontage (qui remplace le batman qui se mue en officier d'appontage pour guider et conseiller le pilote), les Essex refondus SCB-125 reçoivent une proue fermée pour pouvoir opérer dans l'Atlantique et par temps froid et/ou difficile (
hurricane bow), des brins d'arrêts plus puissants, l'air conditionné, l'ascenseur n°1 (axial avant) est agrandit pour les porte-avions refondus SCB-27C alors que les porte-avions SCB-27A voient l'ascenseur n°3 (axial arrière) installé à tribord arrière, le n°2 installé à bâbord avant étant déplacé au bout de la piste oblique.
Sur les vingt-quatre Essex mis en service, seulement quinze ont été refondus SCB-27/125. La non-refonte à concerné deux éclopés du second conflit mondial (Bunker Hill Franklin), trois porte-avions devenus porte-hélicoptères pour les Marines (Boxer Princeton Valley Forge) tandis que les autres on peut avancer soit une question de surplus ou une question de budget (Leyte _un temps prévu mais qui sera maintenu en Corée et remplacé par le Lake Champlain_, Antietam _partiellement modernisé avec l'installation à titre d'essais d'une piste oblique_, Tarawa et Phillipine Sea).
C'est ainsi qu'à l'issue des différentes refontes, les américains distinguent les différents Essex en six sous-classes :
-La Classe Intrepid comprend les porte-avions Intrepid (CV11) Ticonderoga (CV14) Lexington (CV16) Bon Homme Richard (CV31) Oriskany (CV34) et Shangri-La (CV38). Ces porte-avions ont subit les refontes SCB 27C et SCB 125. Des travaux complémentaires sont parfois considérés comme une refonte SCB-125A.
-La Classe Essex comprend les porte-avions suivants (tous reclassés CVS) l'Essex (CVS9) Yorktown (CVS10) Hornet (CVS 12) Randolph (CVS15) Wasp (CVS18) Bennington (CVS20) et Kearsarge (CVS33), ces porte-avions ont tous subit la refonte SCB-27A et SCB 125
-La Classe Antietam comprend le porte-avions du même nom, le CVS 36 Antietam qui à servit de prototype à la refonte SCB 125 avec une piste oblique
-La Classe Lake Champlain comprend le porte-avions du même nom, le CVS 39 Lake Champlain qui n'à jamais subit la refonte SCB 125
-La Classe Boxer correspond aux trois Essex reclassés CVS qui ont été transformé en porte-hélicoptères. Il s'agit du CVS 21 Boxer qui devint le LPH4 , du CVS 37 Princeton devenu le LPH5 et du CVS 45 Valley Forge devenu le LPH-8.
-La Classe Spartan regroupe les porte-avions CVS 32 Leyte, CVS 40 Tarawa, CVS 47 Phillipine Sea ainsi que les porte-avions CV 13 Franklin et CVS 17 Bunker Hill.
Les trois premiers n'ont pas été refondus SCB mais simplement adaptés à leur nouveau rôle de porte-avions ASM tandis que les deux autres, très endommagés par les kamikaze n'ont jamais été remis en service après la guerre, étant placés sous cocon jusqu'à leur désarmement.
Déplacement et dimensions DéplacementLes Essex reprennent l'architecture générale des Yorktown avec un pont d'envol en superstructure de la coque et un ilot guère différent de ses devanciers. Il est simplement plus gros car les américains sont à l'époque libérés des contraintes du traité de Washington et seul le contexte international troublé empêcha les architectes du BuShips de repartir de zéro mais quand on voit la longévité des Essex, on se demande si cela ne fût pas un mal pour un bien.
En terme de déplacement, à leur mise en service, le déplacement standard d'un Essex est de 27200 tonnes soit presque 7000 tonnes de plus que les Yorktown. Ce gain de poids est visible notamment dans le groupe aérien composé en théorie de 100 appareils en cinq squadrons contre 72 en quatre squadrons pour leurs prédécesseurs.
A pleine charge, le déplacement atteint 35400 tonnes soit le déplacement standard d'un cuirassé rapide (certaines sources en ma possession donne 36800 tonnes).
Les refontes d'après guerre vont alourdir les Essex et réduire sensiblement leur groupe aérien qui se stabilise à environ soixante appareils.
Un Essex refondu SCB-27A déplace 28200 tonnes standard et jusqu'à 40600 tonnes à pleine charge alors qu'un Essex refondu SCB-125 déplace 30800 tonnes standard et 41200 tonnes à pleine charge.
DimensionsBien que similaires, les Essex peuvent être reclassés en deux catégories, les coques courtes et les coques longues.
Du côté des coques courtes (
short hull) on trouve l'Essex, le Yorktown, l'Intrepid, le Hornet, le Franklin, le Lexington, le Bunker Hill, le Wasp,le Bennington et le Bonhomme Richard soit dix navires dont le pont d'envol est presque aussi grand que la coque.
Pour augmenter le champ de battage de l'affût quadruple de 40mm avant, les américains privilégient les coques longues (
long hull) qui regroupe les quatorze autres Essex en l'occurence le Ticonderoga (d'où le nom de classe Ticonderoga parfois attribué à ces navires, un nom officieux, jamais reconnu par l'US Navy), le Randolph, le Hancock, le Boxer, le Leyte, le Kearsarge, l'Oriskany, l'Antietam, le Princeton, le Shangri-La, le Lake Champlain, le Tarawa, le Valley Forge et le Phillipine Sea.
Sur ces navires, la taille du pont d'envol est identique mais la coque plus longue permettant à l'affût quadruple de 40mm d'être plus à l'aise.
Les coques courtes affichent donc une longueur hors tout de 265.8m pour une largeur de 28.30m à la flottaison avec un tirant d'eau à pleine charge de 8.38m.
Les coques longues affichent une longueur hors tout de 270.7m de long pour une largeur de 28.30m à la flottaison avec un tirant d'eau de 8.38m.
La taille du pont d'envol est identique aux deux versions soit 262m de long sur 32.9m de large.
Les différences ont disparu après les refontes des années cinquante, le pont d'envol ayant une longueur de 273.70m de long sur 46.30m de large (refonte SCB-27) puis de 271.30m sur 59.70m de large après la refonte SCB-125.
Appareil propulsifLes premiers porte-avions étaient des navires lents souvent car il s'agissait de cuirassés convertis comme l'Eagle britannique ou le Béarn français.
Les premiers vrais porte-avions américains étaient les Lexington et Saratoga, des croiseurs de bataille convertis pour échapper au sort ayant frappé leurs quatre sister-ship (Ranger Constitution Constellation et United States) à savoir la démolition.
Ces porte-avions étaient rapides (plus de 30 nœuds) et possédaient un groupe aérien imposant qui permis aux américains de comprendre l'utilité d'un groupe aérien puissant pour mener des raids de masse (et non de simples piqures de moustique) et d'une vitesse maximale la plus élevée possible permettant d'accélérer les opérations aériennes.
Grâce à une vitesse supérieure à 30 nœuds, le vent artificiel soufflant sur le pont accélérait les avions permettant de faire décoller des avions plus lourds surtout en l'absence de catapulte. Il permettait également à un porte-avions devant mettre en œuvre puis récupérer ses avions de rejoindre rapidement l'escadre.
Les Essex n'échappent donc pas à la règle. Leur système propulsif est classique pour l'époque avec quatre groupes de turbines à engrenages Westinghouse alimentées en vapeur par huit chaudières Babcox & Wilcox.
Les machines _dont le schéma est similaire à celui des nouveaux croiseurs légers de classe Atlanta_ sont fractionnées pour éviter qu'une voie d'eau ou qu'une torpille ne provoquent la perte de toutes les turbines et de tout l'appareil évaporatoire.
Si les chaudières avant alimentent les turbines avant, elles peuvent aussi alimenter les turbines arrière et inversement.
La puissance maximale produite est de 152100ch et chaque groupe de turbine dispose de sa propre ligne d'arbre au nombre de quatre qui entraine quatre hélices de 4.90m de diamètre.
Les réserves de mazout (6330 tonnes) donnent aux Essex un rayon d'action remarquable, faisant des navires taillés pour le Pacifique soit 15540 miles nautiques (plus de 30000km) à 12 nœuds (environ 24 km/h).
La production électrique est assurée par six moteurs diesels, quatre principaux de 1250kW et deux de secours de 1000kW.
Performances La vitesse maximale des porte-avions de classe Essex est de 33 nœuds soit plus de 65 km/h, une vitesse remarquable permettant de faciliter le décollage des avions, d'échapper aux coups de l'ennemi et de rallier rapidement un point menacé du front.
Avec les refontes et l'augmentation de poids, la vitesse à été réduite à 31.5 nœuds ce qui restait encore remarquable.
Pour ce qui est de la distance franchissable, elle est à l'origine de 15540 miles nautiques à 12 nœuds
Protection Comme nous l'avons vu en introduction, la protection des porte-avions fût traitée différemment par les anglais et par les américains, les premiers qui ne pouvaient esquiver et qui ne pouvaient pas facilement remplacer leur porte-avions les dotèrent d'une protection sérieuse qui joua son rôle à merveille (Illustrious, Formidable) mais qui rendit leur modernisation difficile et très couteuse (Victorious).
Les américains opéraient dans un océan permettant l'esquive (Pacifique) et ont des moyens infiniment supérieurs aux britanniques, permettant en gros de remplacer plutôt que de réparer.
D'où le choix calculé, assumé d'une certaine fragilité. La protection est limitée à l'époque, le pont d'envol en bois, servant de «paratonnerre» aux bombes qui se heurtent ensuite à un pont du hangar blindé pouvant résister à des bombes de 227kg mais guère plus ce qui suffira pour le Pacifique (seul le Franklin à eut son pont du hangar percé) mais qui aurait été limité si un Essex avait été engagé en Méditerranée et sous les bombes du Xème Fliegerkorps.
Le pont du hangar et le pont principal sont blindés à 38mm et la coque est munie d'une ceinture blindée longue de 129m et haute de 3m pour une épaisseur variant selon les endroits entre 63 à 101mm.
Les cloisons sont blindées à 100mm, l’ilot est protégé par 25 à 38mm d'acier à blindage tandis que l'appareil à gouverner est protégé à 63mm de blindage.
Les refontes de l'après guerre ont entrainé des modifications dans la protection avec notamment le démontage de la ceinture blindée remplacée par un bulge qui permettait d'augmenter la capacité en carburant aviation.
ElectroniqueLes Essex apparaissent à la même époque que le radar qui va considérablement accroitre les capacités du porte-avions en permettant la détection lointaine des raids aériens ennemis.
Néanmoins, les plans de l'Essex sont dressés sans prévoir d'équipement radar ce qui explique des problèmes d'interférence liées à l'inexpérience des architectes et techniciens américains, à la gestion de la cohabitation radar/conduits de fumée sans compter qu'il fallut trouver un peu de place pour les opérateurs radars faisant de l’ilot un endroit surpeuplé.
La suite électronique implantée sur les Essex à leur mise en service était composée d'un radar de veille air longue distance SK, d'un radar de veille air longue distance SC-2 mais également d'un radar de veille surface type SG, de deux conduite de tir Mk4 et d'une balise aviation (TACAN) type YE.
L'équipement électronique des Essex et notamment les radars ont naturellement suivit l'évolution des radars équipant la marine américaine.
Dans les années soixante, le USS Wasp (CVS-18) dispose d'un radar de veille air SPS-43 couplé à un IFF, un radar de veille combinée air/surface SPS-6, un radar d'altimétrie SPS-8A, un radar de veille surface et de navigation SPS-10, ce dernier étant utilisable pour l'appontage comme le SPN-6 dont c'est la fonction première.
C'est ainsi que les derniers Essex en service (Oriskany Lexington Bonhomme Richard) disposaient d'un radar de navigation et de veille surface SPS-10, d'un radar de veille aérienne SPS-30 (SPS-12 pour le Lexington), un radar de veille aérienne SPS-43A (SPS-37 pour l'Oriskany), un radar d'appontage SPN-10 ou SPN-43, des conduite de tir Mk25 ou Mk35 (le Lexington en est dépourvu) et un ensemble TACAN URN-20.
Armement Quand apparaît le porte-avions, le roi des mers est le navire de ligne, le cuirassé et le croiseur de bataille lointain descendants des galions qui s'affrontaient aux temps de la marine à voile.
Le porte-avions était censé n'être qu'un auxiliaire. Mis à part quelques rares esprits clairvoyants, le porte-avions ne devait être qu'au service du cuirassé pour l'éclairer et ralentir la ligne de bataille ennemie à la bombe et à la torpille, laissant les «gros» achever le boulot.
L'armement des premiers porte-avions devaient pouvoir permettre aux ponts plats et autres
flattop de se défendre contre les croiseurs lourds et les cuirassés.
Les porte-avions de première génération disposaient d'un fort armement antisurface généralement composé de canons de moyen calibre pour dissuader une unité de surface de s'en prendre à lui sachant que son escorte n'était généralement composé que de torpilleurs ou de destroyers.
Tourelles doubles de 203mm du USS Lexington (CV-2)L'Eagle possédait ainsi neuf canons de 152mm, le Béarn huit canons de 155mm et le duo Lexington/Saratoga embarquait huit canons de 203mm en quatre tourelles doubles, le plus gros calibre jamais embarqué sur un porte-aviona, les projets de cuirassés porte-aviona ne voyant jamais le jour.
La DCA était limitée à quelques pièces de moyen calibre et de mitrailleuses aux performances limitées, la puissance aérienne étant encore mal appréhendée à l'époque.
L'armement des porte-avions américains va évoluer sous l'influence des traités de limitation des armements navals mais également des exercices baptisés
Fleet Problem.
Les traités internationaux limitent le tonnage de chaque porte-avions (33000 tonnes) ainsi que leur nombre, les américains comme les britanniques ne pouvant disposer que de 135000 tonnes.
Les nouveaux porte-avions américains ne peuvent être que des unités de taille modeste, guère compatibles avec un armement antisurface aussi puissant (une tourelle double de 203mm pèse 190 tonnes) sans compter que les manœuvres annuelles montrent l'efficacité de frappes aériennes massives.
Le porte-avions doit embarquer le plus grand groupe aérien possible ce qui impose de faire de la place à des avions de plus en plus gros.
L'armement va désormais être orienté antiaérien avec des canons de moyen calibre à capacité duale et de nombreuses pièces antiaériennes légères, des mitrailleuses de 12.7mm et des canons de 28mm puis très rapidement, les «stars» du second conflit mondial, le Oerlikon de 20mm et le Bofors de 40mm.
Tourelles doubles de 127mm sur un destroyer américainLes premier Essex disposent d'une solide DCA pour l'époque avec douze canons de 127mm répartis en quatre tourelles doubles soit huit canons installés de part et d'autre de l'ilôt, les quatre derniers étant installés à babord, deux à l'avant et deux à l'arrière.
Affût quadruple de 40mm Bofors à bord du croiseur léger USS Georges Leygues après refonteA ces canons utilisables pour la défense antiaérienne et pour la défense antisurface s'ajoute des canons légers en l'occurence 32 canons de 40mm Bofors en affûts quadruples (trois sur l'îlôt, un au dessus des tourelles de 127mm arrière, une avant, une à l'arrière et une derrière chacun des canons simples de 127mm) et 35 canons de 20mm Oerlikon en affûts simples installés dans des baignoires latérales.
Canon de 20mm Oerlikon à la proue du cuirassé USS Iowa (BB-61) en 1943Le retour d'expérience pousse les américains à augmenter la défense antiaérienne notamment à l'avant et à l'arrière du navire.
C'est la raison d'être des coques longues (ou classe Ticonderoga) qui dégage l'avant du navire pour permettre l'installation d'un affût quadruples supplémentaire à l'avant ainsi que trois affûts quadruples supplémentaires installés à tribord portant le nombre de Bofors à douze affûts quadruples.
L'irruption des kamikazes augmente encore la DCA au point que les architectes navals doivent mettre le hola pour éviter de mettre en danger la stabilité du navire en réduisant notamment le stock d'obus à proximité des pièces.
Pour donner un exemple, à la fin de la guerre, l'Intrepid dispose de douze affûts quadruples Bofors (48 canons) et cinq affûts doubles soit un total de 58 canons de 40mm auxquels s'ajoutent 61 canons de 20mm en affûts simples ou doubles.
Canon de 76mm Mk10 installé sur le porte-avions USS Lexington (CV-16)Après guerre, les canons de 20mm qui avaient atteint leurs limites face aux kamikazes sont débarqués bientôt suivis des canons de 40mm remplacés par des canons de 76mm de 50 calibres, pièce conçue pour lutter contre les kamikazes mais arrivée trop tard pour être utilisée durant le second conflit mondial.
Canon de 127mm en affûts simples à bord du croiseur lourd USS Wichita (CA-45)C'est ainsi que les Essex refondus SCB-27 ne disposaient plus que de 8 canons de 127mm en affûts simples (emplacement inconnu) et 14 canons de 76mm en affûts doubles Mk33.
Les Essex refondus SCB-125 ne disposaient plus que de 7 canons de 127mm et 8 canons de 76mm, le Yorktown lors de son reclassement en porte-avions anti-sous-marin (CVS) ne disposait plus que de quatre canons de 127mm.
Installations aéronautiques Lors de leur mise en service, les Essex sont à la croisée des chemins. Les porte-avions disposent tous de brins d'arrêt pour récupérer les avions (aucun autre système n'à été mis au point et à ma connaissance envisagé) mais tous ne disposent pas de catapultes, aucun porte-avions japonais ne disposant d'accélérateur qui permettait de mettre en œuvre des avions plus lourds et plus puissants.
Ainsi l'Essex à sa mise en service ne disposait d'aucune catapulte sur le pont d'envol, ne recevant qu'une catapulte H2 sur le pont d'envol à l'issue de sa croisière de mise en condition opérationnelle mais disposait déjà d'une catapulte de hangar.
Le deuxième navire de cette classe, le Yorktown reçut lui deux catapultes H4B, une installée sur le pont d'envol soit un emplacement tout à fait classique et une deuxième installée en travers du hangar ce qui était une position plus inhabituelle.
Cet emplacement s'explique par les contraintes des opérations aéronavales depuis un porte-avions muni d'un pont droit.
A l'époque, pas question de faire apponter et de faire décoller en même temps les appareils du groupe aérien. En phase appontage, les avions sont concentrés sur l'avant et protégé des avions appontant par une barrière.
Inversement donc en phase décollage/catapultage où les avions sont concentrés sur l'arrière, la ou les catapultes étant souvent utilisées pour les premiers avions qui n'ont pas grande distance pour décoller.
En l'absence de radars ou avec un pont d'envol encombré, les américains veulent pouvoir catapulter si nécessaire un avion de reconnaissance ou une patrouille de combat aérien (
Combat Air Patrol) pour protéger le porte-avions d'une attaque ennemie.
Les autres Essex reçurent eux deux catapultes sur le pont d'envol, la catapulte de hangar qui ne semble pas avoir été utilisée en opérations étant démontée, la généralisation du radar et une recherche d'économie de poids expliquant ce démontage.
La refonte SCB-27A remplace les catapultes de pont d'origine par des catapultes hydrauliques H-8 plus puissantes même si la technique même de la catapulte hydraulique atteignait ses limites.
La refonte SCB-27C remplace les catapultes hydrauliques par des catapultes à vapeur C11 plus puissantes et plus sures, permettant de lancer sans problème un avion à réaction généralement plus gros et plus lourd que son devancier à hélice.
La refonte SCB-125 ne change rien à l'équipement en catapultes mais à leur remplacement si, une catapulte étant installée sur la piste oblique, la catapulte tribord restant sur la piste axiale à sa place d'origine.
Contrairement aux catapultes, les brins d'arrêt ont été présents non stop durant toute la carrière des Essex même si les refontes des années cinquante ont entrainé le remplacement des brins plus anciens par des brins plus récents mieux à même de stopper des avions de plus en plus lourd et surtout de plus en plus rapides à l'appontage.
Les brins d'arrêt d'origine Mk4 ou Mk5 furent ainsi remplacés par des Mk7 au cours de la refonte SCB-125 qui ont remplacés des brins d'arrêt installés au cours de la refonte SCB-27 dont j'ignore le modèle (Mk6?).
Des brins d'arrêts furent également installés à l'avant pour permettre l'appontage par l'avant avec un porte-avions fonçant en marche arrière mais il semble que cette capacité n'à jamais été utilisée en hors essais.
Le hangar ouvert des Essex était relié au pont d'envol par non pas deux mais trois ascenseurs. Les deux premières étaient des ascenseurs axiaux et le troisième un ascenseur latéral.
Les ascenseurs axiaux mesuraient 14.7m de long sur 13.5m de large pouvant embarquer 12.7 tonnes (un Hellcat pesait 5.7 tonnes, un Helldiver 7.6 tonnes pleine charge) n'étaient pas des nouveautés à la différence de l'ascenseur latéral.
Plus grand mais également plus étroit (18.3m de long sur 10.4m de large), il pouvait se replier latéralement pour permettre le passage par les écluses du canal de Panama.
Les trois ascenseurs mettent 45 secondes pour monter et descendre ce qui facilite les opérations sachant que les américains ne faisaient descendre les appareils dans le hangar pour le gros entretien, le ravitaillement en armes et en carburant se faisant sur le pont d'envol.
Leur emplacement à changé au grè des refontes. Si la refonte SCB-27A ne change pas leur emplacement (mais en augmente la taille), la refonte SCB-27C transfère l'ascenseur axial arrière à tribord arrière alors que la refonte SCB-125 transfère l'ascenseur latéral tribord au bord de la piste oblique.
Groupe aérien Comme toutes les marines, l'US Navy commença par une phase expérimentale qui dura une dizaine d'années.
Avec le Langley, les marins américains eurent la certitude que le porte-avions était un concept valable puis avec le duo Lexington/Saratoga, ils comprirent que pour être efficaces, les attaques lancées par un porte-avions devaient être massives ce qui impliquait un groupe aérien important.
La capacité aérienne plus que la protection était la vertue cardinale des porte-avions américains et le groupe aérien du Ranger, des Yorktown et du Wasp était plus important que les porte-avions britanniques ou que le Béarn français.
Il se composait ainsi de quatre squadrons de dix-huit appareils soit un groupe aérien conséquent de soixante-douze appareils répartis en un squadron de chasse, un squadron d'avions-torpilleurs et deux squadron de bombardement en piqué, les appareils utilisés par cette unité servant également pour la reconnaissance selon le concept de Scout-Bomber dont le représentant le plus illustre fût Douglas SBD (Scout-Bomber Douglas) Dauntless soit 18 chasseurs, 18 avions-torpilleurs et 36 bombardiers en piqué/éclaireurs
Les groupes aériens portent le numéro de coque de leur porte-avions ce qui nous donne CVG-6 pour le USS Enterprise (CV-6), le seul survivant avec le Saratoga des porte-avions d'avant guerre engagés dans le Pacifique.
La guerre rendra impossible le maintien du lien indissoluble entre la plate-forme et son groupe aérien et désormais les porte-avions recevront un groupe aérien disponible et inversement, un
Carrier Air Group embarquera sur le premier porte-avions disponible.
Avec les Essex, la structure du groupe aérien évolue avec l'embarquement d'un cinquième squadron équipé de chasseurs, les différents exercices et notamment les manœuvres Fleet Problem ayant montré l'importance de la chasse pour escorter les raids aériens et protéger le porte-avions ce que les grandes batailles au delà de l'horizon ne feront que confirmer.
Le groupe aérien théorique de l'Essex se compose donc de 36 chasseurs, 36 bombardiers en piqué et 18 avions-torpilleurs soit un total de 90 appareils.
Sur le plan opérationnel, la théorie préconise des raids massifs où les bombardiers en piqué devront ralentir la flotte ennemie pour laisser aux torpilleurs le soin de mettre le coup de grâce.
Cette belle théorie ne tint pas longtemps la route notamment à Midway où les différents avions se perdirent de vue, attaquant séparément. Le massacre des avions-torpilleurs ouvrit la voie aux bombardiers en piqué, les chasseurs japonais pourchassant les Devastator au ras des flots et ne pouvant reprendre de l'altitude pour contrer les Dauntless.
Avec le cours de la guerre, la composition des groupe aériens américains va évoluer de manière sensible.
Si les groupes aériens spécialisés dans les opérations nocturnes n'ont qu'une existence somme tout limitée, les autres groupes aériens vont perdre peu à peu les avions-torpilleurs et les bombardiers en piqué au profit de chasseurs-bombardiers.
Passée la bataille du Golfe de Leyte (23-25 octobre 1944), la marine japonaise n'à plus les moyens de disputer même localement le contrôle des mers à l'US Navy.
Les avions-torpilleurs et les bombardiers en piqué vont peu à peu céder la place aux chasseurs-bombardiers, des Grumman F6F Hellcat mais surtout des Chance-Vought F4U Corsair.
Ce dernier appareil à été longtemps très mal vu par l'US Navy qui lui reprochait une vitesse à l'appontage excessive ce qui explique qu'il fût d'abord utilisé à terre par l'USMC et la célèbre VMF-214 popularisée par la série «Les têtes brûlées».
Une fois la bête domptée, le Corsair se révéla parfaitement adapté aux missions confiées à savoir la couverture et l'appui aux troupes au sol (recevant le surnom de la
Sweetheart of Okinawa _la fiancée d'Okinawa) ainsi que la couverture de la flotte contre les nuées de kamikaze.
C'est ainsi qu'à la fin de la guerre certains groupes aériens embarqués sur les Essex disposaient de 72 chasseurs-bombardiers Hellcat ou Corsair et de seulement dix-huit bombardiers en piqué/avions-torpilleurs.
Dans l'immédiat après guerre, les groupes aériens des Essex (CVG puis CVAG du 11 septembre 1946 au 1er septembre 1948 et de nouveau CVG) combinent avions à hélice et avions à réaction dans un nombre semblable à celui du second conflit mondial, les trois appareils dominant étant les Grumman Panther, le Douglas Skyraider et le Chance-Vought Corsair. L'hélicoptère fait également son apparition.
Après les différentes refontes des années cinquante, les Essex deviennent des CVS (seuls l'Oriskany le Hancock et le Bonhomme Richard resteront CVA jusqu'à la fin de leur carrière) et le groupe aérien s'adapte.
La majorité étant devenus des CVS, ils embarquent des groupes aériens spécialisés, les CVSG qui disposent d'avions de lutte anti-sous-marine Grumman Tracker, d'hélicoptères anti-sous-marins Sikorsky Sea King, des avions de guet aérien avancé Grumman Tracer auxquels s'ajoutèrent durant la guerre du Vietnam un détachement de Skyhawk utilisés moins pour l'attaque que pour offrir une défense aérienne limitée à ces porte-avions.
Les Essex utilisés comme porte-avions d'attaque embarquaient un groupe aérien composé généralement de cinq squadrons et de détachements d'appareils spécialisés.
Sur les cinq squadrons, on trouvait à la fin de leur carrière (c'est à dire pour la plupart au Vietnam) deux squadrons de chasseurs-intercepteurs LTV F-8 Crusader et trois squadrons d'attaque, tous équipés de Douglas A-4 Skyhawk même si certains conservaient un squadron de Douglas Skyraider ou préféraient au Skyhawk celui qui devait le remplacer à savoir le Corsair II, adaptation pour l'attaque au sol du Crusader.
Les détachements étaient composés d'appareils spécialisés qu'il s'agisse d'avions de reconnaissance (RF-8 Crusader), de guerre électronique (Skywarrior), de ravitaillement en vol (toujours le Skywarrior), d'alerte aérienne avancée (Tracer) et d'hélicoptères (Sea King mais le plus souvent des Seasprite).