Bonjour,
En complément de la réponse d'Alain (Starshiy), un petit point succinct sur les fusées et leurs emplois, en se limitant aux deux derniers conflits mondiaux.
Les obus navals perforants étaient équipés d'une fusée (d'ogive) à impact (ou choc) avec délai. Pour amorcer la fusée à impact, il fallait un choc suffisant, calculé durant les essais de munitions. Pour simplifier, il fallait un impact direct sur un blindage d'au moins 100 mm, pour initier la fusée d'un obus de gros calibre; le délai de la fusée (plusieurs 10èmes de seconde) permettait de déclencher la charge additionnelle explosive contenue dans l'obus, après le percement du blindage, pour aggraver les dégâts. Dans ce cas, on parle d'obus de rupture, pour les différencier des "boulets", sans charge explosive additionnelle, utilisés, par exemple, en antichar (obus à noyau de carbure de tungstène, avec lequel, seules, les projections de métal mises en fusion lors du perçage pouvaient causer des dégâts supplémentaires, dans l'habitacle du char).
Les perforants à impact ne réagissaient pas, sauf dysfonctionnement, en percutant la mer - force de l'impact insuffisante pour amorcer la fusée -. Néanmoins, un "modeste" obus de 400 kg, à la vitesse de 500 m/s, quand il entrait en contact avec la flotte, créait une très jolie colonne d'eau.
Les obus explosifs, également utilisés avec les grosses pièces, étaient, eux, le plus souvent, dotés de fusées chronométriques ou à temps (
tempées, selon la vieille expression française révolue des années 1870), le plus souvent, des fusées de culot. L’amorçage de la fusée était calculée selon le temps de vol du projectile (abaques établis à partir de longues séries d'essais, qui prenaient compte, par exemple, l'usure de la pièce après X coups tirés... Vo moindre, en raison du "vent" du projectile dans l'âme de la pièce). L'obus explosif était destiné à ravager les superstructures non ou faiblement blindées - le cas d'obus perforants traversant une passerelle sans exploser était un cas courant, les dégâts se limitaient, alors, à ceux créer par le "souffle" de son seul passage, qui pouvait, sans problème, flinguer la totalité d'un état-major sur ladite passerelle! -. Un obus explosif, réglé trop court ou trop long, explosera, systématiquement, en fin de course, la fusée se déclenchant à la fin du temps de vol pris en compte. L'explosion peut, tout aussi bien, avoir lieu lors du vol (durée de fusée trop longue), sur le bord de l'adversaire, opposé au "tireur", ou devant, dans la mer (distance calculée trop courte), sauf que, avec les obus explosifs, il y avait, en général, des marqueurs colorés (pour identifier, à la fois, le tireur - tourelle et/ou bâtiment-, et corriger, si nécessaire, le tir - en principe, les perforants disposaient, eux aussi, de marqueurs, sauf que, s'ils finissaient à la baille, il n'y avait pas d'infos "disponibles" -. Dans la mesure du possible, les artilleurs de marine s'efforçaient de tirer plus court que trop loin, pour mieux juger des résultats.
A la détonation, dans la flotte, un obus explosif créé un plouf ou une colonne d'eau plus importante - dans certains rapports, il était fait mention de colonnes d'eau de plus de 50 m de haut et au-delà! - et sa coloration était beaucoup plus sombre, du fait de la charge explosive... sauf que sur les photos en N&B, ces particularités sont loin d'être évidentes.
La fusée de proximité n'était pas en usage, pour les pièces de marine, en emploi "mer-mer' ou "mer-terre" jusqu'en 1945.
Après, il convient de distinguer le type de fusée, dite de proximité, car la DCA, durant la Seconde Guerre Mondiale utilisera, pour les pièces de gros calibre, le principe de l'explosion à proximité, qui n'est autre que l'emploi d'une fusée chronométrique (éventuellement, complétée par une mesure altimétrique), pour faire détoner ses obus à l'altitude de vol "estimée" des appareils (çà marche avec une flotte de bombardiers à moyenne et haute altitude, contrainte, durant un certain délai, de voler à une altitude stabilisée pour larguer ses bombes). Là, on n'exploitait pas l'effet d'impact et d'explosion de l'obus "dans la cible", mais le pouvoir létal et la portée des éclats - ce sont les fameux nuages noirs qu'on remarque, dans le ciel, sur les clichés de DCA -.
La vraie fusée de proximité exige, elle, un dispositif électronique de détection intégré dans l'obus. Son emploi se développera réellement, avec la mise en service des semi-conducteurs, dans les années 1950-1960. Jusque là, l'électronique était à base de tubes à gaz, fragiles, encombrants et trop coûteux pour bénéficier d'un emploi généralisé.