Je vais essayez de te résumer le cheminement historique, mais, pour çà, il faut remonter très loin.
A l'origine, dans le cadre des batailles navales - on va oublier les galères, mais c'est une histoire comparable, - on embarquait, à bord de bâtiments ventrus - des naves marchandes réquisitionnées ou nolisées - de la soldatesque (archers, arbalétriers, piétons, gens d'armes), l'équipage de marins, réquisitionnés avec leur navire, se contentant, en principe, de manœuvrer et diriger les bâtiments jusqu'au lieu de la bataille.
En France, il avait fallu attendre le Ministère du Cardinal de Richelieu et les années 1627-1630, pour que le Royaume s'équipe d'une marine militaire nationale. Entre temps, depuis le XVIème siècle précédent, les armes à feu - arquebuse, premiers mousquets et canons - étaient devenues courantes à bord et le Cardinal avait, alors, crée le corps des canonniers de la marine, d'autant que les bâtiments avaient, eux-mêmes, grossis, leurs artilleries & voilures avaient augmenté et exigeaient, dès lors, un équipage de plus en nombreux.
A la même époque, nous avions fait comme les copains en créant des colonies, où il nous avait fallu installer des garnisons et des défenses d'artillerie de côte, d'où la création de l'Artillerie et de l'Infanterie de la Marine, vu que le ministère était commun à la Marine et aux Colonies.
Alors, à partir de là, il y avait eu deux cas distincts, le premier, transporter ces troupes, en tant que passagers, à bord des bâtiments, vers leurs affectations coloniales et, bien évidemment, à l'occasion de leurs relèves; le second, l'Armée et, notamment, la Marine, de tout temps, chopant des boutons à l'idée que leur personnel puisse se comporter comme des couleuvres, faute d'activité durant ses longues pérégrinations maritimes, avaient mis en place un système de garnison à bord des bâtiments, assuré par l'Infanterie de la Marine - quitte à ce qu'elle mette la main à la pâte, lors des manoeuvres de voilure sur le pont. Progressivement, le principe de la garnison permanente s'était installé, avec, par exemple, en janvier 1786, en temps de guerre, un effectif de 180 soldats, à bord d'un vaisseau de 110 canons (1062 hommes sans compter l'état-major), 100, à bord d'un 74 (664 h), 45, d'une frégate de 36 pièces de 18 livres (297 h), 35, à bord d'une frégate de 32 pièces de 12 livres (246 h). Même avec une flotte de 60 bâtiments de tous types, vaisseaux et frégates, çà n'allait péter bien loin. A la même époque, les détachements du Corps Royal des Canonniers-matelots, étaient, respectivement, de 79, 52, 28, 25, sachant que les matelots sans spécialités (alors, très nombreux à bord), qui passaient l'essentiel de leur temps à participer aux autres spécialités, faisaient, alors, office de servants auxiliaires à chaque pièce!
En 1786, justement, s'effectue une refonte assez malheureuse, dans ses résultats, du "Corps des Canonniers-matelots" et, en 1793, à l'initiative de Jean Bon Saint André, un des deux Ordonnateurs civils de la Marine, la "big catastrophe", avec la dissolution ordonnée du Corps des Canonniers-matelots et, en parallèle, de l'Artillerie et l'Infanterie de la Marine, formations jugées trop élitistes, corporatistes, etc.... place à la "Garde nationale" et ses recrues... qui vomissaient, déjà, tripes et boyaux, à la vue d'un navire à quai! En 1795, Le Directoire avait essayé d'y mettre très vite bon ordre, mais le mal était profond!
En ce qui concerne l'Artillerie de la Marine, on avait encore continué, quelques décennies, avec deux "systèmes" parallèles & complémentaires, d'un côté, des chefs de pièces et des adjoints, marins spécialisés et une équipe de quelques cadres "techniciens", eux, issus, de l'Artillerie de la Marine et des Colonies, mais leur tâche principale, comme pour l'Infanterie de la Marine, étaient à terre, dans les colonies.
L'évolution de la machine à vapeur avait amené la création de spécialités nouvelles, Machinerie, Chaufferie, et la spécialisation, purement navale, des équipages avait, dès lors, fait boule de neige pour le service de l'artillerie du bord et les tâches de la garnison, avec la création du Corps spécialisé des fusiliers-marins. Au fil du XIXème siècle, la présence à bord des artilleurs et fantassins, dits "de la Marine", s'était limitée à leur seul transport, vers nos garnisons coloniales ou à l'occasion d'expéditions toutes-aussi coloniales. En parallèle, l'instruction des officiers, à l’École Navale, s'était, elle-aussi, diversifiée et spécialisée.
Cette évolution s'était déroulée, en France, sur près de 300 ans. Seule, la Royal Navy a continué d'entretenir, à bord de ses bâtiments, une troupe de fantassins spécialisés, les Royal Marines; disposition particulière qu'avaient calquée leurs cousins d'Amérique, après leur indépendance, pour l'US Navy et la création de l'US Marine Corps, subordonné à l'US Navy.
Il ne faut pas, non plus, oublier que les "garnisons" de fantassins, à bord des bâtiments, avaient, également, une motivation moins évidente, celle d'éviter une trop grand risque de compromission entre matafs et biffins, dans le cadre de la police quotidienne du bord et de la garde aux accès, notamment, en condition de combat, les troupiers et fusiliers étant sensés garder les descentes et empêcher les désertions.
Après, que les Ricains aient constitué un corps expéditionnaire spécialisé, est une autre paire de manche, car nos "Marsouins", qui suivent le sillage des navires, ou "Bigors" (abréviation des bigorneaux accrochés à la coque!) s'en démerdavent très bien.