Intéressant échange sur les vertus comparées des PA Américains et Britanniques.
Les deux types ont chacun leurs avantages et défauts.
Les navires US ont gardé après les Lexington et jusqu'aux Essex un hangar ouvert bâti au-dessus de la coque pour plusieurs raisons qui se défendaient à l'époque :
- Un tel hangar permet une économie de poids et une augmentation de taille (en hauteur), le pont blindé étant dessous, plus près du centre de gravité. En conséquence, le navire embarque moins de paquets de mer sur le pont d'envol (opération aériennes plus sécurisées... les Midways étaient notoirement humides) et la place est plus généreuse dans le hangar (celui des Illustrious, trop bas de plafond, limitait considérablement son utilisation, le type d'avion pouvant y être embarqué, etc).
- Les avions embarqués US avaient des moteurs en étoile à refroidissement par air (au contraire des Seafire et autres Fulmar à moteur en ligne à refroidissement liquide). Les moteurs refroidis par air demandent un long temps de chauffe au démarrage ET de refroidissement à l'arrêt. On pensait à l'époque accélérer la manoeuvre des avions en démarrant les moteurs dans le hangar, qui devait donc rester ouvert. Quand on essaya pour la première fois des opérations avec le parc aérien complet sur les Midway (à l'époque Corsairs, Hellcats, Bearcats et Helldiver) on se rendit vite compte que sur ces navires à pont blindé et hangar fermé ce genre de manoeuvre était trop lente.
- Certes, un hangar type US ne résistait pas aux bombes, mais le pont blindé en-dessous, lui résistait d'autant mieux que le pont d'envol déclenchait en amont l'explosion de celle-ci.
Si vous examinez le rapport de dommages du Franklin ( http://researcheratlarge.com/Ships/CV13/1946DamageReport.html faites défiler jusqu'aux plans et ouvrez "plate 2 et plate 3") vous constaterez que les énormes dommages subis par le PA sont contenus au-dessus du pont blindé du hangar qui est à peine voilé par la chaleur des incendies.
Sa reconstruction consista à démolir puis rebâtir le hangar et fut moins problématique que les longues réparations de l'Illustrious dont la poutre-navire avait été endommagée.
Pour un type de dommage similaire (bombe sur le parc aérien armé avec incendie général), les Kaga et Akagi furent mis hors de combat en quelques minutes : les deux avaient un hangar fermé.
Ainsi, de par leur légèreté, le hangar et le pont d'envol jouent bien leur rôle de tampon en contribuant à protéger les parties vitales du navire.
A contrario, un hangar fermé (type Illustrious, mais aussi Lexington ou Taiho) peut être un véritable piège si une bombe le pénètre et explose à l'intérieur : tout le monde connait l'effet multiplicateur d'une explosion en milieu confiné.
Le Lexington n'a pas survécu à l'explosion interne des vapeurs d'essence dans la Mer de Corail. Même punition, probablement, pour le Taiho Japonais.
Autre aspect, celui de la résistance de la poutre-navire : sur les Illustrious (et Taiho, Midway) le pont d'envol joue le rôle de la poutre supérieure. S'il est atteint dans son intégrité, c'est la résistance à la flexion de l'ensemble du navire qui est fragilisée. Ceci, si ma mémoire est bonne, explique (en partie seulement) le vieillisement accéléré des Illustrious et leur courte carrière d'une vingtaine d'années.
Sur les PA Américains, la poutre supérieure est le pont du hangar en partie protégée par le hangar.
Je pense que malgré une structure apparemment plus fragile, les PA Américains "à hangar et pont d'envol rapportés" autorisent un plus grand espace de manoeuvre, une meilleure protection contre les paquets de mer et une moindre fatigue de la poutre navire entrainant une plus grande longévité. La carrière des Essex qui passèrent, en gros et au cours de leurs refontes, de 30 000 à 40 000t tout en naviguant plus de 30 ans avec des avions de plus en plus gros est là pour l'attester.
Sources :
Norman Friedman : US Aircraft Carriers, an Illustrated History
Anatomy of The Ship : HMS Illustrious, USS Intrepid
US Bureau of Ship War Damage Reports (NARA)